Ex nihilo Neil

05 août 2011

Les Prétendants d'Elya (9)

Comme j'arrive un peu en limite de réserves, je vous propose quelques dessins que j'avais exécutés pendant la partie. C'est du "sur le vif", hein...



Conversation amicale

« Allez-y ! Je dois régler cela seul ! » s’exclama le mage des ombres, se relevant péniblement. Il avança vers Mercutio, sans crainte apparente si ce n’est une légère flagellation des jambes. Vallach’ nous réunit autour de lui, ferma les yeux en tendant les bras, paumes ouvertes vers l’avant, et nous quittâmes lentement le sol. Galaad et Pelenor, tout en armure, Azyel, l’épée au clair, Vallach’, la rapière au côté, et moi-même, le shaaduk’t en main, partîmes ainsi pour les cieux affronter un peuple d’hommes-oiseaux pour sauver une reine fée, une ville, un royaume, et peut-être bien le monde.
De sorte que la scène entre Aléthéïos et Mercutio m’échappa quelque peu.
Cependant, d’après les témoignages de nombreux passants, je puis reconstituer le dialogue entre les deux personnages.
« Bonsoir, messire Mercutio. Je n’ai plus mes pouvoirs, je suis dans l’incapacité la plus totale de vous affronter à armes égales.
— Moi non plus, je n’ai plus mes pouvoirs. Et si tu le demandes, je puis aussi poser mon shaaduk’t.
— Hé, hé, hé… Je crains que cela ne suffise pas…
— En effet, Aléthéïos, fils de Pyros, nous ne pourrons jamais combattre à égalité. Tu œuvres sur le sombre chemin du mal, je travaille à la magnificence de la lumière, comment pourrions nous être à égalité ? Pourquoi Kalimsshar t’a-t-il envoyé ici, toi ?
— Oh, vous me voyez bien haut dans la hiérarchie. Je n’ai rencontré qu’une fois le Sombre Seigneur, et je n’étais pas en âge de m’en souvenir…
— Parlons âge, justement. J’ai bien reçu le faire-part de naissance, charmante attention de ton traître de père. Ça te fait combien ? Six ? Huit ans ? Une nouvelle diablerie fataliste, sans doute ?
— Une simple expérience de lien. Thallia ici présente… Enfin, ici évanouie, m’a offert son savoir et son expérience, ainsi qu’une dizaine d’années d’existence pour tenir le choc. Je suis le premier sur qui l’expérimentation est un succès.
— Ainsi Pyros a-t-il définitivement perdu l’esprit, pour laisser la chair de sa chair servir de pâtures aux expérimentations eugéniques de ses supérieurs. Cela pourrait être assimilé à la création d’une nouvelle race…
— Édit draconique que vous avez vous-mêmes largement violé en votre temps, n’est-ce pas ? La glorieuse B-team. Père m’en a si souvent parlé… Quand l’étoile qui vous guidait a-t-elle cessé de scintiller ? »
À ce moment, un homme ailé s’écrasa dans un grand bruit, laissant une masse de chair morte et ensanglantée à une dizaine de mètres des protagonistes. Aucun ne sembla le remarquer.
« Chacun a jugé bon de retourner à ses occupations. Ces pleutres en avaient assez de sauver le monde. Certains ont réintégré l’anonymat d’où ils n’auraient jamais dû sortir. D’autres ont fondé foyer, et contribuent à la vie de leur communauté. L’un s’est retourné contre les forces de la lumière et a décidé de vouer sa vie au mal.
— Mais pour vous, le repos n’était pas permis n’est-ce pas ?
— Le repos n’est qu’un compromis.
— Et les compromis, c’est mal. Vous êtes prévisibles, vous autres héros, c’est ce qui vous rend faible.
— Tu n’es pas en position de me juger, freluquet. J’accepterais ces remarques de ton père, pas de toi. Cependant, par égard pour l’aide (sans doute involontaire, ou due à d’obscures raisons que je préférerai pour l’heure écarter) que vous avez pu apporter à cette petite compagnie improvisée, toi et cette créature, je vais vous laisser poursuivre votre route. J’ai une seule question à te poser, et je ne la poserai pas deux fois. Où est ton père ?
— Nous y voilà. Vous désirez vous venger de mon père, c’est là la… »
À ce moment, selon les témoins, Mercutio, qui se trouvait à six mètres pour le moins la demi-seconde d’avant, se retrouva à proximité du mage, passa prestement un bras autour de son cou et le maintint en une clé particulièrement efficace. Le mage pouvait encore parler, mais il ne faisait aucun doute que le prodige pût à tout instant lui briser les vertèbres comme à un poulet.
« J’avais prévenu, Aléthéïos. Je ne la répéterai pas.
— À… à Nadjar. Il est à Nadjar. »
Mercutio relâcha alors son emprise, tourna les talons et s’éloigna. Au moment où il allait disparaître entre deux maisons, la voix d’Aléthéïos retentit :
« Il vous attend, vous savez. Il sait que vous irez. Il vous attend. »
La haute silhouette s’immobilisa un instant, et la voix rocailleuse retentit doucement entre les pierres de la place.
« Il a grand tort. »
Et l’ombre disparut.

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