Ex nihilo Neil

19 novembre 2025

Tu t'envoles, tu t'envoles, tu t'envoles...

 



Nous avons récemment amené notre plus jeune nièce voir Peter Pan au théâtre Bobino, et c'était très bien. Pas une prouesse insensée de mise en scène, pas un retournement de cerveau à la Michalik, mais une très solide version de la pièce de J. M. Barrie.

Je ne suis pas un grand fan de Peter Pan, mais ça n'en est pas moins une œuvre importante pour moi car la version animée par Disney fut le premier film où j'ai compris qu'on essayait de me dire plus que ce qu'on me montrait. Peter Pan est une œuvre truffée de symboles pas bien compliqués*, mais les décrypter de soi-même quand on est encore enfant, ça fait quelque chose. 

C'est en revanche bien plus tard que j'ai réalisé à quel point Peter Pan est avant tout une pièce, pensée pour les planches. Pourtant les indices sont nombreux : les costumes très marqués, pour bien distinguer les groupes de personnages sur scène (les enfants perdus, les pirates, les peaux-rouges**...), la structuration en scènes (dans la chambre des enfants Darling, chez les sirènes, sur le bateau...), et bien sûr le non-personnage de Clochette, incarnée par un simple rai de lumière accompagné d'un tintement, que l'on ressuscite en faisant applaudir le public (et ça marche du tonnerre sur un théâtre plein de gamins).

Cette version mise en scène par Guy Grimberg propose tout ça et un peu plus, puisqu'il s'agit en outre d'un spectacle musical, avec des chansons et des danses pas honteuses du tout. J'ajoute qu'il a eu l'intelligence de faire jouer les enfants par des comédiennes, ce qui permet d'avoir un bon jeu et des notes justes, ce qui n'est pas toujours le cas (n'est-ce pas Les Mystérieuses Cités d'or*** ?). 

* Les pirates représentent les adultes qui courent après leur jeunesse perdue, Crochet est l'image du père (ce qui est souligné par la tradition voulant que Crochet et le père Darling soient joués par le même acteur), mais aussi de l'adulte vieillissant qui fuit devant la mort, cette dernière étant symbolisée par le crocodile qui a mangé une pendule (rappelant le tic-tac de l'inexorable temps qui passe), etc. C'est vraiment pas dur à décoder, mais ça demande quand même de se poser la question, ce qui en fait une excellente œuvre jeunesse.

** Le traitement des peaux-rouges dans la pièce est d'ailleurs... euh... disons qu'en France on s'en fout un peu, mais qu'aux États-Unis cette version serait clairement classée comme problématique. 

*** Je suis mesquin car l'abominable spectacle des Cités d'or a depuis changé d'idée et fait désormais incarner Esteban, Tao et Zia par des adultes grimés. À mon avis ça ne le sauvera pas, mais bon, c'est déjà ça. 

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