Ex nihilo Neil

16 janvier 2023

Écosystèmes et conséquences

 


J'ai pris mon temps avant de parler de mon sentiment sur Avatar 2, et j'ai bien fait puisque depuis j'ai vu Strange World (Avalonia l'étrange voyage en VF, parce que les traducteurs aussi ont des n + 1 incompétents), le dernier Disney, et j'ai plein de trucs à dire.

Avatar 2, c'est très long, c'est très convenu, et si ça n'avait pas coûté 400 millions de dollars tout le monde trouverait que c'est quand même un peu cliché, mais que pour un premier film c'est sympa.

En outre, et c'est un aspect qui me touche davantage, un des arguments de vente d'Avatar (le premier comme le deuxième), c'est ce formidable monde de Pandora, avec son écosystème incroyable, jamais vu, où tout est relié en une espèce de bio-Internet, oh la la c'est fou, on peut se brancher aux chevaux, tu m'étonnes que ça plaise aux petites filles. Pardon, je m'énerve. C'est juste que le monde de Pandora, comme je l'ai déjà dit, je le trouve ultra générique et sans âme. Si les effets n'étaient pas si beaux (et ils sont à tomber, hein, pas de problème), on le trouverait tout à fait à sa place dans un film basique du MCU se passant sur une planète lointaine, ou dans un épisode de Star Trek. Alors que quand j'ai commencé à regarder Strange World, le premier truc que j'ai vu de l'écosystème qui nous est proposé m'a plus intrigué que l'intégralité de ce que j'avais vu dans Avatar. Sincèrement. 


 

Bon, je laisse ce pauvre James Cameron se consoler avec ses millions et ses rêves bleus, et je vais plutôt partir sur Strange World qui, contrairement à ce que vous pourriez penser, vaut vraiment le détour. Déjà parce que vous n'êtes peut-être même pas au courant qu'il est sorti, vu que Disney nous a refait une « John Carter » en limitant au maximum la promotion et la publicité. Ce qui, une fois l'œuvre vue, n'est pas très étonnant : c'est sans doute le film le plus woke de toute l'histoire du studio, et de loin. 

Du coup il se ramasse une volée de bois vert de la part de tout ce que le net compte de trous du cul d'homophobes et autres ligues de vertu, et rien que pour ça vous devriez le voir. Mais par ailleurs, c'est aussi un film plutôt malin dans ses thématiques, même si ce n'est pas le plus émotionnant du studio. Qu'il s'agisse de la leçon sur le conflit des générations (basique mais efficace) ou du message écologique (beaucoup plus moderne qu'on ne le croirait à la base), le film est une leçon d'écriture, malgré ses quelques failles. 


C'est marrant parce que j'ai vu le film avec Bij, qui pour des raisons personnelles est très attentive, voire susceptible sitôt qu'il est question d'agriculture dans une œuvre. Or, dès le début, on voit ces champs gigantesques « d'énergie cultivée ». Et dès le début, elle a râlé en critiquant cette monoculture, en disant que c'était débile et que ça ne pouvait pas marcher. Ce à quoi j'ai répondu par une remarque narquoise, car je suis fort agréable à vivre au quotidien. Eh ben j'avais tort : cette monoculture intensive, qui n'est pas particulièrement soulignée mais bien présente, est un point essentiel du message du récit, qu'on ne comprendra que bien plus tard. 

Car Strange World a deux thématiques : 

  • La première, la plus évidente, que vous aurez captée dès la bande annonce, c'est un conflit très classique entre trois générations, le grand-père aventurier, le père fermier et le fils qui se cherche. Ils vont apprendre à respecter leurs différences, blablabla, c'est bien fait même si on n'est pas dans le haut du panier de ce que Disney a déjà proposé dans le registre de l'émotion familiale (voir Lilo et Stitch et Dingo et Max pour ça).
  • La seconde est plus cachée, c'est le message écologique. Avalonia est une utopie fondée sur une source d'énergie propre et inépuisable, et déjà ça fait du bien de voir une utopie fonctionnelle au cinéma. Seulement ladite source a un problème, et il faut monter une expédition pour la sauver. Sauf qu'une fois arrivés sur place, beaaaaaaucoup plus tard dans le film, on découvre que ce problème attaquant la source est en fait, pour simplifier, le monde lui-même, et que sauver la source revient à détruire le monde. La symbolique est limpide (énergies fossiles, toi-même tu sais), mais elle va même plus loin puisqu'elle sous-entend qu'une énergie propre ne l'est pas forcément, que la recherche est indispensable pour comprendre toujours plus et mieux, et que la collaboration est préférable à la compétition (bon, ça c'est pour raccorder avec la première thématique). 

Sur ces deux points, le récit est élégant et ménage ses effets, en restant intelligible et plaisant à suivre. Quant à l'aspect woke... que dire ? Le fils est gay et ça ne pose de problème à absolument personne, les postes de pouvoir sont occupés par des femmes sans que ça ne soulève le moindre sourcil, le couple principal est mixte et tout le monde s'en fout... sur le papier ça n'a l'air de rien, mais de la part de Disney, qui se la racontait grave parce que deux figurantes se font un bisou à la fin d'un Star Wars ou que deux hommes muets se tiennent la main dans DuckTales, c'est un pas de géant. 

Sur cette image sont fielleusement dissimulés un jeune garçon gay,
un couple interracial, une femme chef d'État et un
patriarche non homophobe. La civilisation va s'écrouler dans 3... 2...

De la part des créatifs, hein. Parce que comme je le disais, les publicitaires et les commerciaux, eux, ont sûrement trouvé que c'était beaucoup trop et tenté d'enterrer le film en faisant le moins de promo possible pour éviter les clash sur Internet. C'est pourtant un film tout à fait digne d'intérêt, avec de très bonnes idées, et ça ne peut faire que du bien de le regarder, alors ne vous privez pas !


Aucun commentaire: